Intouchables, les Intouchables d’Eric Toledano et Olivier Nakache, ceux qui semblent faire l’unanimité parmi les critiques, qui recueillent déjà un excellent bouche-à-oreille de la part des premiers spectateurs, qui reçoivent des applaudissements spontanés du public à la fin des projections? Ah! C’est ce qu’on va voir…
Parce que des comédies dites “populaires”, on en a déjà maté plus d’une, nous, Monsieur!
On les connaît par coeur, ces films qui nous balancent les meilleurs gags dans la bande-annonce puis nous déçoivent lamentablement lors de la projection… Et en plus, le teaser de ce film-là, avec Omar Sy qui refuse à un François Cluzet tétraplégique une friandise sous prétexte que “pas de bras, pas de chocolat”, mouais bof… Ca laisse augurer un truc assez lourdingue…  Alors, on va voir ce qu’on va voir…

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Donc, on nous dit que l’histoire est touchante,  nia nia nia…
Ca parle de la rencontre entre Philippe (François Cluzet), un homme fortuné, tétraplégique depuis un grave accident de parapente, et Driss (Omar Sy), un jeune de banlieue, ex-délinquant englué dans une certaine misère sociale. Le second postule pour devenir l’aide-soignant attitré du premier. Il n’a aucune qualification, aucun diplôme et même aucune envie de travailler. Il veut juste qu’on lui signe un papier qui justifie de sa recherche d’emploi, afin de pouvoir prétendre au RMI. Mais Philippe, qui vient de voir défiler des postulant trop sérieux ou carrément stupides, est intrigué et séduit par ce grand gaillard qui semble ne pas éprouver de commisération à son égard et qui dégage une certaine énergie. Il lui propose de cesser d’être assisté et de travailler pour lui, à l’essai, pendant un mois…

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Evidemment, Driss accepte la proposition, avec d’autant plus d’entrain qu’on lui propose un confortable logement de fonction sur place, avec une salle de bain gigantesque pour lui tout seul. Ca le changera de ce minuscule appartement familial dans une cité HLM de banlieue, dans lequel on ne peut pas prendre une douche tranquillement sans voir débarquer quatre ou cinq frères et soeurs impertinents et sans-gêne. Et surtout, ça tombe bien, puisqu’il venait de se retrouver à la rue, banni par sa mère…

Pour Philippe aussi, c’est une aubaine. Enfin quelqu’un qui ose le secouer un peu, l’obliger à réagir, qui le traite d’égal à égal, qui lui balance vanne sur vanne et lui permet d’oublier un peu son handicap. Et quand la maladie se rappelle à son bon souvenir, le jeune homme a une thérapie meilleure que les pilules de ses médecins, un remède à base de résine de cannabis qui calme ses angoisses et le plonge dans une relative béatitude…
Au fil des jours, la complicité s’instaure entre les deux hommes…

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Et ça c’est émouvant, alors? Ah ben oui, tiens, ça fonctionne bien ce truc-là. C’est une belle histoire d’amitié qui défile devant nos yeux. On prend plaisir à les voir s’amuser, se titiller, s’enrichir mutuellement de leurs différences. On est touchés, même, par tant d’humanité, de solidarité, de tolérance… Par cette relation qui s’affranchit des histoires de races, de condition physique, de classe sociale. Par ce film qui donne la pêche en abordant avec humour et philosophie des sujets assez lourds…
Hé! Qu’est-ce que… Non, attendez un peu. Une histoire pareille, ce n’est pas crédible! Du chiqué! Du mélo facile fabriqué de toute pièces, avec une trame grossière en plus! Un attrape-gogos!
Pardon? C’est tiré d’une histoire vraie? Ah bon!?! Première nouvelle! Merci de nous prévenir!
C’est donc tiré de l’histoire vraie de Philippe Pozzo di Borgo et d’Abdel Sellou, le jeune rebelle qu’il a engagé pour être son aide-soignant. Une relation employé/employeur qui a duré dix ans et qui s’est muée en grande histoire d’amitié, qui dure encore aujourd’hui…
Bon, d’accord, au temps pour nous, l’histoire est donc très crédible – puisque réelle – très touchante, très bien menée par Nakache & Toledano…

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Mais bon, la faille doit bien se retrouver au niveau des acteurs, alors!
Tenez, François Cluzet en millionnaire tétraplégique, il va bien nous en faire des tonnes dans le registre larmoyant à roulettes… Non? Ah ben non, il est très bon dans ce registre-là, entre aristocrate intello et sale gosse rebelle. Constamment juste aussi bien dans le registre de l’humour que de l’émotion, et sans jamais tomber dans le pathos, ce qu’aurait renié la personne dont il s’inspire…

OK, Cluzet est bien intouchable… Mais Omar Sy, c’est une autre affaire. Franchement, un comique de télévision qui brillerait sur grand écran… Vous voulez rire?
Ah oui, vous riez… Et nous aussi, on doit bien l’avouer… Et beaucoup. Et fréquemment… A vrai dire, c’est probablement le film qui nous a le plus secoué les zygomatiques cette année sur grand écran. Ah! La scène de l’Opéra! Quel fou rire! On en a encore mal aux abdos! Et ces répliques, percutantes, hilarantes, irrésistibles!

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Et pour en revenir à Omar Sy, il y a plus de force humoristique dans une seule de ses vannes, dans ce film – à l’exception, peut-être, de celle évoquée plus haut – que dans toutes les pitreries des carrières cinématographiques conjointes de Franck Dubosc, Jean-Marie Bigard et Elie Semoun.
Le bonhomme possède une indéniable présence à l’écran, une énergie comique évidente, et une belle palette de jeu d’acteur qui lui permet de nuancer ses personnages.
Cela dit, avouons-le, ce n’est pas vraiment une surprise : il nous avait déjà conquis – dans des seconds rôles – dans les précédents films du duo : Nos jours heureux et Tellement proches.

Bon Omar Sy aussi est intouchable… Aïe, ça se corse… Les seconds rôles peut-être?
Ben non, ils sont également parfaits, d’Anne Le Ny à Audrey Fleurot, de Clothilde Mollet à la délicieuse Alba Gaia Bellugi – remarquée en ado à problème dans La Robe du Soir de Myriam Aziza et assez irrésistible, ici, en ado boudeuse et insolente.

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Ah, les cons! Toledo et Nakache ont réussi leur coup. On n’a plus d’argument à leur opposer pour démolir leur film… Au contraire, on a même envie de le défendre très fort, comme tout le monde… et comme les autres films du duo, que l’on avait bien apprécié (y compris le premier, Je préfère qu’on reste amis – voilà pour notre spécificité “à contre-courant”, na!). Que dire, alors d’Intouchables hormis qu’il s’agira probablement de la “comédie de l’année” et d’un très beau succès au box-office?
Pourquoi pas cette réplique tirée du film, qui résume bien notre avis ? :

”- Alors, t’as kiffé?
– Oui, j’ai kiffé…
– Quoi, c’est tout? T’as juste kiffé?
– J’ai kiffé grave! “

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Intouchables

Réalisateurs : Olivier Nakache, Eric Toledano
Avec : François Cluzet, Omar Sy, Anne Le Ny, Audrey Fleurot,
Clothilde Mollet, Alba Gaia Bellugi
Origine : France
Genre : pas de bras, pas de chocolat
Durée : 1h52
Date de sortie France : 02/11/2011
Note pour ce film : ●●●●○
contrepoint critique chez : Les Inrockuptibles

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1 COMMENT

  1. Excellent article, qui, à l’image même du film, ne s’embarrasse pas de fioritures inutiles: il nous livre une impression vraie, celle d’une surprise. Car oui, Intouchables déjoue nos a prioris, et ridiculise tous les films prétentieux en nous montrant que pour survoler les autres et devenir intouchable, il suffit d’un peu de franchise et de légèreté (et de talent).

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