Toujours un temps gris et pluvieux sur la Croisette… Ah! Mais que fait la police !?!
Eh bien, elle est sur l’écran… Car cette année, on note une forte présence policière parmi les films de la sélection officielle.
Les deux séances de minuit, Monsoon shoutout et Blind detective, étaient des thrillers. The Bling ring et Fruitvale station sont tirés de faits divers réels. L’inconnu du lac est construit comme un polar. Et, dans les sections parallèles, Ugly, Ain’t them bodies saint, Tip top, Blue ruin, Salvo, sont tous soit des polars, soit des films noirs. Et on attend encore une pleine poignée de films de genre d’ici à la fin du festival.
On commence tout de suite avec Shield of straw, le nouveau film de Takashi Miike, où une équipe de flics réputés incorruptibles doit escorter jusqu’au tribunal un criminel dont la tête a été mise à prix par le père d’une de ses victimes, un richissime homme d’affaires. Evidemment, la perspective de toucher la prime pousse la population à tenter d’attaquer le convoi. Mais le danger vient peut-être aussi de l’intérieur du groupe. Après tout, le criminel est une ordure de la pire espèce et sera condamné sans l’ombre d’un doute par le tribunal. Alors, certains flics pourraient être tentés d’arrondir leurs fins de mois en commettant une petite entorse au règlement…
Un milliardaire installé sur la Côte d’Azur a dû poser un contrat sur la tête de ce long-métrage, tant les réactions de nos confrères de la presse ont été violentes. Le moins que l’on puisse dire, c’est que Shield of straw n’a pas été bien reçu!
Certes, il avait sans doute plus sa place en séance de minuit qu’au milieu de la compétition officielle, mais de là à le lapider de la sorte, il y a de la marge…
Notre avis, empreint de près de vingt ans d’expérience de festivalier, se veut un peu plus nuancé. (lire notre critique).
Blood ties, de Guillaume Canet, a été un peu mieux accueilli, même s’il n’a pas non plus suscité un enthousiasme débordant chez les festivaliers.
Beaucoup ont trouvé le film très correctement filmé, interprété à la perfection par Clive Owen et Billy Crudup, mais lui reprochent son manque d’originalité. Evidemment, il y a un air de déjà-vu… Blood ties est le remake “américain” du film de Jacques Maillot, Les Liens du sang. Et son scénario a été revu et corrigé par James Gray, qui avait présenté dans l’auditorium Lumière La nuit nous appartient. Mais cela donne un polar bien au-dessus du tout venant hollywoodien, qui a toute sa place en sélection officielle. (Lire notre critique)
Ceux qui détestent les films policiers ont dû se consoler avec Un Château en Italie, le nouveau film de Valeria Bruni-Tedeschi. Comme dans Il est plus facile pour un chameau… et Actrices, la cinéaste et comédienne s’inspire de sa propre vie pour trousser une comédie dramatique où elle peut exposer ses angoisses – de la mort, de la maladie, de la solitude… – et ses obsessions – la recherche de l’amour, la cellule familiale…
Le résultat, drôle, tendre et teinté d’une pointe d’amertume tenace, nous a séduits (Lire notre critique) mais, comme Shield of straw, nous semble trop “léger” pour prétendre à la Palme d’Or.
Nous avons déserté la section Un Certain Regard aujourd’hui. Apparemment, nous n’avons rien raté…
Omar du palestinien Hany Abu-Assad a séduit les festivaliers par son scénario, autour des tourments d’un jeune palestinien contraint par l’armée israélienne de trahir ses amis pour conserver sa liberté. Mais il pèche apparemment au niveau de la mise en scène, qui n’arrive jamais à donner au film l’ampleur dont il a besoin.
Quant à As I lay dying, de James Franco, beaucoup l’ont trouvé ennuyeux et mal filmé, malgré les expérimentations visuelles de son cinéaste.
A la place, nous avons passé un peu de temps à la Quinzaine des réalisateurs.
Nous avons commencé par une virée sur la planète rouge avec The last days on Mars de Ruairi Robinson. Un thriller de science-fiction assez convaincant, qui emprunte beaucoup à des oeuvres comme Alien, Prometheus ou The Thing et qui s’appuie sur un solide casting (Liev Schreiber, Elias Koteas, Romola Garai et Olivia Williams). Bon, attention, ce n’est qu’une petite série B de derrière les fagots… Pas de quoi faire sauter un amateur d’Art & Essai au plafond…
Certains ont d’ailleurs exprimé leur incompréhension et leur mécontentement quant à la présence de ce film au sein de la sélection. En ce qui nous concerne, on ne va pas se plaindre… Il y a deux-trois ans, la Quinzaine s’était fourvoyée en sélectionnant une majorité d’oeuvres austères, assez ennuyeuses et/ou esthétiquement laides. The Last days on Mars est tout le contraire : agréable à regarder, plutôt fun et parcouru d’une tension constante.
Et puis, comme on dit, “Un mars et ça repart!”… Hum, pardon…
L’autre film du jour, lui, a totalement conquis le public, qui a réservé une standing-ovation à son réalisateur, Guillaume Gallienne. Il faut dire que Les Garçons et Guillaume, à table!, adaptation du spectacle autobiographique qu’il a joué sur scène il y a quelques années, est une comédie assez irrésistible.
Incarnant son propre rôle et celui de sa maman, il parle du trouble identitaire qui l’a accompagné tout au long de son adolescence, de sa relation fusionnelle avec sa mère, de celle, plus heurtée, avec son père, de son attirance pour les garçons et, en même temps, de son amour pour les femmes. Sa mise à nu est audacieuse, troublante, émouvante et souvent très drôle. Même si la réalisation manque parfois de relief, se contentant d’essayer de gommer l’origine théâtrale du projet, le spectacle est suffisamment agréable et bien rythmé pour susciter l’adhésion des spectateurs. En tout cas, si l’accueil cannois préfigure celui du grand public, Les Garçons et Guillaume, à table! est promis à un beau succès au box-office…
A demain pour la suite de nos aventures cannoises…