Le remake inutile du jour est à mettre à l’actif de Bradley Cooper, qui s’est lancé dans une nouvelle version de A Star is born, un grand classique du mélodrame hollywoodien.
D’accord, le film original de William Wellman, sorti en 1937, a déjà fait l’objet de deux autres versions, ayant toutes deux connu un certain succès. Celle de George Cukor, en 1954, portée par le duo Judy Garland/James Mason, est considérée comme supérieure à son aînée, et celle de 1976, plus anecdotique, a ses fans, notamment pour la performance vocale de Barbra Streisand. Alors, pourquoi pas une version remise au goût du jour, avec des interprètes qui parlent un peu plus au jeune public? Eh bien, parce qu’ici, il n’y a absolument rien à apprécier….

Le scénario? C’est exactement le même que pour les versions précédentes : un chanteur célèbre prend sous son aile une jeune chanteuse, l’épouse, en fait une star et, voyant que sa propre carrière décline à mesure que celle de sa protégée décolle, sombre dans l’alcoolisme. Certes, cette intrigue a un jour obtenu l’Oscar du scénario. Mais c’était en 1938, il y a plus de quatre-vingt ans! Autant dire que depuis, c’est une intrigue qui a été usée jusqu’à la corde, vue, revue et re-revue.

La mise en scène? Quelle mise en scène? Un style très lisse, qui se contente de champs-contrechamps mollassons et ne communique jamais aucune émotion. Même les scènes musicales sont platement filmées, sans aucun relief, aucune folie… On ne s’attendait pas à retrouver la maîtrise de George Cukor, mais au moins, on aurait voulu un peu d’audace, de proposition de cinéma!

Les acteurs? Bof… Bradley Cooper livre une caricature de chanteur de blues fatigué. Son niveau d’expressivité ne dépasse pas celle de ses publicités pour une célèbre marque de crèmes glacées. Bien que débarrassée de ses looks excentriques, Lady Gaga surjoue quasiment toutes les scènes sans jamais retrouver la justesse de Judy Garland ou Janet Gaynor. Et musicalement, pardon à ses fans, mais c’est laborieux!
Dès la chanson qui marque la rencontre des deux personnages, on sait que cela ne va pas être une partie de plaisir. Sur scène, Lady Gaga interprète – “massacre” serait un terme plus adéquat – une version de “La Vie en rose” et cela fait fondre Bradley Cooper – si,si, une larme coule sur sa joue. Le public aussi, pleure… Car comme le projectionniste de la salle Darsena a eu la mauvaise idée de mettre le son à fond les ballons, plusieurs ont les tympans percés. Et les spectateurs français pleurent du sang, enragés d’entendre la langue de Molière ainsi malmenée. Gaga Ouh la la!

Heureusement, un ou deux numéros musicaux se laissent voir avec plaisir, notamment les duos des deux personnages principaux, qui fonctionnent plutôt bien. Mais franchement, cela ne valait pas la peine d’en faire un film, ni de l’infliger aux spectateurs. Pourquoi ne pas avoir essayé de proposer un scénario original, autour de la personnalité et des compositions de Lady Gaga? Pourquoi ne pas avoir tenté de revisiter, autre que musicalement, l‘intrigue originale? Décidément, à Hollywood, les scénaristes ont de moins en moins d’imagination…

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Rédacteur en chef de Angle[s] de vue, Boustoune est un cinéphile passionné qui fréquente assidument les salles obscures et les festivals depuis plus de vingt ans (rhôô, le vieux...) Il aime tous les genres cinématographiques, mais il a un faible pour le cinéma alternatif, riche et complexe. Autant dire que les oeuvres de David Lynch ou de Peter Greenaway le mettent littéralement en transe, ce qui le fait passer pour un doux dingue vaguement masochiste auprès des gens dit « normaux »… Ah, et il possède aussi un humour assez particulier, ironique et porté sur, aux choix, le calembour foireux ou le bon mot de génie…

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