– Déplacement, de Joshua Cotter –

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Dernièrement, en trainant dans les rayons d’un supermarché, je suis tombé sur une bédé de science-fiction, du genre que l’on qualifie volontiers de « space opéra », avec double-page sensées vous couper le souffle à base grosses navettes hyper-réalistes et de paysage lunaires boostés à grands coupe d’effets photoshop…
Vous voyez de quelle bédé je parle ?
Non, forcément : de tels bouquins, on en trouve à tour de bras en tête de gondole chez Carrouf’ !

Alors si vous voulez de la SF un peu différente, oubliez les grosses maisons d’éditions « ensoleillées », et tournez-vous donc vers les indé’ ! Par exemple, chez Çà & Là, vous trouverez en ce moment le premier tome de Déplacement, une série SF originale et intelligente qui débute sous les meilleurs augures.

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Originale, déjà, par son ambiance graphique : oubliant l’esbroufe visuelle sus-citée, Déplacement se pare d’un sobre et élégant noir et blanc mettant en valeur sa profusion de détails. Une profusion de détails servant réellement le sujet, d’une part en récréant des décors débordants de tuyaux, cadrans, boutons et autres bitoniaux qui peuplaient alors l’imaginaire SF des années 50 / 60, d’autre part en appuyant le côté anxiogène de l’histoire, la multitude de petits traits envahissant les cases se révélant presque étouffante.

Intelligente, enfin, car sous ses faux airs de SF à papa, Déplacement dissèque de son œil acerbe bien des travers de notre société actuelle : l’écologie, en premier lieu, via la recherche d’une planète de remplacement pour notre pauvre Terre surpeuplée et dépouillée par l’Homme ; la sur-connexion à laquelle nous sommes tous exposés – tant les réseaux sociaux actuels se font de plus en plus intrusifs dans nos vies privée – est ici symbolisée par « le flux », une sorte de super-internet allant piocher les info’ à partager directement dans le cerveau des gens ; et en toile de fond – grâce à des personnages particulièrement bien écrits – un individualisme de plus en plus présent et pesant, le mal de vivre pouvant en découler, l’implication excessive dans son travail pour (tenter de) l’oublier, le non-respect de l’humain au profit d’un progrès aussi peu éthique que lucratif…

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Une BD originale et intelligente, donc, qui s’écarte du style actuel et hyper-convenu du genre pour lui préférer ses illustres ancêtres que furent les Kubrick ou autres Philip K. Dick ; un rythme très lent qui prend tout son temps pour créer son propre univers – très personnel et extrêmement soigné – et petit à petit poser les bases de ce qui sera assurément une grande saga de science-fiction… une grande saga tout court !

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Déplacement, de Joshua Cotter (ed. Çà & Là).

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