Looking_for_Grace-3 Si les premiers films présentés lors de cette 72ème Mostra ont parfois brillé par leur manque d’originalité, ce n’est absolument pas le cas de Looking for Grace, le nouveau film de l’australienne Sue Brooks. Cela tient essentiellement à un scénario morcelé, qui révèle l’intrigue par petites touches, selon des points de vue différents et qui oscille constamment entre plusieurs registres, comédie, drame, thriller. Ainsi, le spectateur ne sait jamais où la cinéaste va l’emmener, et se laisse surprendre tout au long du récit.
La première partie relate le voyage de deux adolescentes en route pour aller à un concert de hard-rock. Elles rencontrent un bel inconnu qui semble aller dans la même direction qu’eux. Grace se laisse séduire par l’individu. Ayant l’impression d’être de trop, son amie Saffi décide de rebrousser chemin à mi-parcours. A partir delà, on se demande ce qui va arriver à Grace. Va-t-elle être agressée par l’individu? Va-t-elle le suivre jusqu’au bout de l’Australie? Va-t-elle se lancer dans un long périple en solitaire?
La réponse ne tarde pas à venir et n’est pas exactement celle que l’on attendait. Et la suite est encore plus déstabilisante…

Les segments suivants, plus ou moins courts, nous présentent d’autres personnages. Un routier et son jeune fils. Un vieux détective privé aimant beaucoup s’admirer. Les parents de Grace, partis à sa recherche… On ne comprend pas tout de suite le lien entre les différentes séquences, mais cela ne fait qu’attiser notre curiosité et nous donne envie de découvrir la suite.
La cinéaste n’a plus qu’à jouer avec nos émotions en multipliant les ruptures de ton. On passe de l’angoisse au rire et du rire aux larmes en un clin d’oeil, au gré des séquences, avec le même bonheur que dans Japanese story, le film qui avait fait connaître la cinéaste en France en 2004.
Plus le film avance et plus il nous touche. On peut se reconnaître dans les problématiques universelles qu’il aborde : le passage de l’adolescence à l’âge adulte, le passage de l’âge adulte au troisième âge, les premiers chagrins d’amour et les difficultés qui peuvent survenir au sein d’un couple de longue date, les relations parents-enfants,…  Rien de fondamentalement nouveau, mais tout est abordé avec tellement de délicatesse et d’intelligence que l’on ne peut que se laisser séduire par ce joli film.

Evidemment, par rapport à d’autres films au sujets plus sérieux, plus graves, Looking for Grace ne part pas favori de la course au Lion d’Or. Mais son charme discret aura probablement fait craquer quelques membres du jury et lui vaudra peut-être un prix à l’issue de cette compétition 2015.

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Note :
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Rédacteur en chef de Angle[s] de vue, Boustoune est un cinéphile passionné qui fréquente assidument les salles obscures et les festivals depuis plus de vingt ans (rhôô, le vieux...) Il aime tous les genres cinématographiques, mais il a un faible pour le cinéma alternatif, riche et complexe. Autant dire que les oeuvres de David Lynch ou de Peter Greenaway le mettent littéralement en transe, ce qui le fait passer pour un doux dingue vaguement masochiste auprès des gens dit « normaux »… Ah, et il possède aussi un humour assez particulier, ironique et porté sur, aux choix, le calembour foireux ou le bon mot de génie…

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