– L’île Panorama, de Suehiro Maruo –

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Au japon, s’il est généralement coutume d’incinérer les défunts, celle-ci peut s’avérer méprisée par certaines familles riches lui préférant largement l’inhumation. Lorsque Genzaburô Komoda, première fortune de la préfecture de Mie, décède son corps échappera donc aux flammes pour reposer sous terre.

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Hirosuke Hitomi, écrivain raté et sans le sou, y voit une occasion rêvée : celui-ci ressemblant de manière troublante au riche défunt – dans leur jeunesse, on les prenait couramment pour des jumeaux – il décide de s’appuyer sur le fait que certaines personnes déclarées comme mortes prématurément ressortent de leur cercueil quelques jours après leur enterrement afin de s’emparer de son identité. Ainsi, il met en scène son propre suicide, se rend au cimetière où repose Komoda afin d’en faire disparaître le corps – non sans lui avoir au préalable subtilisé sa fausse dent et se l’être placée dans sa propre bouche – et s’étale de tout son long sur un chemin tout proche, feignant d’être Genzaburô revenu des morts !

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Aussi macabre soit-il, ce subterfuge le placerait à la tête d’une immense fortune, et lui permettrait, de fait, de réaliser son plus grand rêve : créer de toute pièce un lieu semblable au paradis sur Terre. Pourtant, entre le danger que représentent les proches de feu son « jumeau » prêts à le démasquer, et la folie des grandeurs prête à dévorer son cœur et son âme, ce paradis rêvé pourrait rapidement se transformer en véritable enfer…
…une descente en enfer, voilà ce que propose originellement le roman éponyme de Edogawa Ranpo ; la déchéance d’un homme se croyant dieu et finissant diable, incroyablement mise en image par Suehiro Maruo. Grâce à son trait précis, élégant et foisonnant de détails, il dépeint aussi bien le grandiose que la misère, nous envoute avec ses paysages idylliques époustouflants peuplés d’êtres sibyllins et gracieux, nous dérange lorsque la douce volupté s’épand dans le stupre malsain, et nous effraie quand, dans les yeux d’Hirosuke, le regard rêveur de l’utopiste vire au regard glaçant du fou.

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L’île Panorama, de Suehiro Maruo (Ed. Casterman)

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