Depuis l’immense succès de la BD Lastman – véritable carton ayant même bénéficié d’adaptations en dessin animé et en jeu vidéo – on ne présente plus Michaël Sanlaville, l’un des acolytes du célébrissimes Bastien Vivès aux manettes de ladite série. Fort de ce succès, c’est tout naturellement que Casterman lui a laissé les mains libres pour bédéïfier San Antonio, personnage phare de Frédéric Dard dont il est fan devant l’éternel.
Après une première aventure dans le Beaujolais, c’est sous le crachin breton qu’on retrouve aujourd’hui « San A » et sa bande de joyeux drilles : le gros Béru’, c’te vieille branche de Pinuche, ce vicelard de Chauve, sans oublier l’affriolante Marie-Marie ! Si l’on parlera ici de l’assassinat d’un vieux matelot imbibé de chouchen, de l’explosion d’un phare par un groupe d’indépendantistes bretons, d’un complot américano-russe réchauffé de la guerre froide, ou d’un sniper aussi prompt à tirer des coups que la veuve pas si éplorée, tout ceci ne restera que du fallacieux prétexte pour s’en taper une bonne tranche ! Ah parce que là, j’peux vous affirmer que niveau déconne et gros n’importe quoi, on y va pas avec le dos de la cuillère : du calembours en-veux-tu-en-voilà, du jeux de mots n’en-veux-tu-plus-en-revoilà-quand-même, de l’humour bien lourd et bien gras qui pourrait presque te rester sur l’estomac… s’il n’était pas servi avec tant d’amour (avec du poil autour) et totalement assumé, que dis-je, revendiqué !
Et la partie graphique sera totalement du même acabit : Sanlaville s’en donne à cœur joie, son trait déjà hyper-dynamique habituellement devient ici totalement libre et fou ! Les perso’ – à qui il offre des tronches largement inspirées de « gueules » de légendes comme Gainsbourg, Rochefort, la Bardot ou encore cet ivrogne d’Haddock – semblent « surjouer » en permanence, l’action est ininterrompue, les cases explosent, et tout vole en tous sens en un joyeux bordel : les objets, les véhicules, les gens et même les sécrétions corporelles… qu’il s’agisse de sueur, de vomi ou de cyprine !
Alors vous l’aurez compris, fidèles à l’image des romans éponymes, ces bédés sanantoniennes ne font clairement pas dans la dentelle – irrévérencieuses à souhait et pas fines pour un sou – mais affichent pour le matériel originel une passion poisseuse et moite suintant abondamment de chaque trait et de chaque bulle de chaque case de chaque page de chaque album !
* San Antonio, si ma tante en avait, de Michaël Sanlaville (Ed. Casterman)