– Pierre de cristal, de Frantz Duchazeau –

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Pierre a dix ans. Pierre n’est plus un bébé, mais Pierre n’est pas encore un homme. Pierre est pile entre les deux. S’il regarde par-dessus son épaule, il voit que son enfance est encore là, juste derrière lui, innocente et insouciante ; mais s’il regarde vers l’avenir, d’autres préoccupations, bien plus graves et pesantes, apparaissent sur le bord du chemin… des préoccupations d’adulte ?
Il regarde ses copains d’école qui écrasent sans remord une pauvre mante religieuse, et se demande pourquoi ils font preuve de tant de cruauté.
Il regarde ses parents qui ne se parlent plus que très peu, et se demande s’ils s’aiment encore.
Il regarde ses grands-parents qui lui paraissent soudainement très vieux, et se demande s’ils vont vivre encore longtemps.
D’ailleurs, il se demande également combien de temps il reste à vivre à sa mère, car dans ce film de science-fiction qu’il aime temps, les gens meurent à 30 ans.
Et puis, finalement, il se demande combien de temps il reste à vivre à tout le monde, vu que la maîtresse a expliqué que le soleil était condamné à disparaître…

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Si c’est ça, la vie d’adulte, il faut avouer que ça ne donne pas bien envie ! Alors Pierre se raccroche de toutes ses forces aux derniers restes de son enfance, son imagination qui lui permet de vivre dans un monde dont il a le contrôle, ses souvenirs qui le réconfortent et l’apaisent… et en cherchant bien, même dans son présent, tout n’est pas si sombre : il reste la folie douce de son garçon-manqué de cousine, ou les petits plaisirs quotidiens comme un bon plat de pommes de terre sautées !

D’un trait doux et extrêmement léger – parfois à peine esquissé comme s’il illustrait ces doux souvenirs d’enfance que l’on peine à se remémorer mais auxquels on s’accroche pourtant de toutes nos forces – Duchazeau nous expose une série d’instantanés, de tranches de vie tout aussi douces et légères qui nous rappelle les petites joies de nos jeunes années… et y ajoute cette pointe d’amertume et de gravité qui accompagne fatalement le terrible passage vers la vie d’adulte.

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Ce qui pourrait au premier abord passer pour une sorte de version mélancolique du Petit Christian – grand classique du non-moins grand Blutch – se révèle au fil des pages comme un joli mixe entre un vieil album photo au charme suranné et le récit initiatique sensible et touchant d’un grand garçon qui devient un petit homme…

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Pierre de cristal, de Frantz Duchazeau (ed. Casterman).

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