– Les Portes de Shamballah, de Mazuer, Romano & Taranzano –

A l’heure où mon cinéphile de collègue publie un article élogieux sur The Social Network – film où David Fincher dénonce les dérives et les dangers des réseaux sociaux – moi, justement je me balade sur FaceBook et tisse le réseau de ma petite R-à-B toute jeune et jolie…
De click en click, de request en suggest, je deviens le friend d’un certain Pierre Taranzano, dessinateur de son état.
Après un échange de mails sympathique, me voilà bientôt avec ses albums entre les mains… plutôt cool, non, le réseau social !?
D’autant plus cool, que la surprise fut au rendez-vous… et qu’elle fut bonne, la surprise !

Comme vous l’aurez sûrement compris au fil de mes chroniques, ce que j’apprécie particulièrement, c’est l’école nouvelle BD option indé’ à tendance underground, dans l’esprit Trondheim et sa descendance plus ou moins légitime et reconnue. Du coup, il est plutôt rare que je me tourne vers les albums au dessin réaliste et chiadé. Je sais, ce comportement sectaire est une erreur, mais il est surtout le résultat d’un manque de temps, et non d’un rejet imbécile.
Heureusement, certaines rencontres et autres échanges sont prompts à rompre le cou de ces mauvaises habitudes. Ce qui fut le cas avec Pierre Taranzano, réparant mon erreur d’être passé à côté des Portes de Shamballah.

1929. Malcolm Mackenzie – agent du renseignement britannique enquêtant sur un cercle ésotérique – est en fuite en Chine. Afin d’échapper à ses poursuivants, il embarque clandestinement sur un bateau et fait connaissance avec Erwan Frioul ; jeune archéologue français montant une expédition à la recherche du mystérieux royaume d’Aggartha, un monde souterrain peuplé par une ancienne civilisation bien plus avancée que la notre.
Y voyant un signe du destin et se sentant en danger, Malcom lui confie avoir déjà entrevu ce royaume et décide de lui exposer son étrange histoire…
…ce qui sera pour nous l’occasion de s’y plonger aussi !
Ainsi, on suivra les péripéties de Malcom des sombres ruelles du Londres du XIXème siècle au docks crasseux de la Grosse Pomme au début du XXème, en passant par les Indes et la Chine à l’époque du grand royaume colonial britannique. L’espion au service de sa majesté se frottera à de bien mystérieux personnages, vivra de dangereuses aventures, et se verra même confronté aux forces occultes.
Un scénario dense et intense, donc, mais aussi et surtout documenté. Beaucoup de faits réels et de personnages ayant existés ont été intégrés dans cette série ; et si son but premier est clairement de divertir, elle apporte aussi un nombre important d’informations (et de questions) sur l’ésotérisme, les croyances autour des anciennes civilisations, les sociétés secrètes, leur implication dans l’Histoire, les célébrités et personnalités les ayant fréquentées…
Un mélange fiction / réalité savamment dosé pour rendre se vider la tête tout en se la remplissant !

Ce qui aurait pu me faire passer à côté de cette série si intéressante, en fait, c’est justement le dessin réaliste et chiadé dont je parlais plus haut.
Parce que là, question dessin chiadé, y a du niveau !
Du coup, au premier abord, on pourrait même croire à trop de fougue et d’effets (plongées, contre-plongées, explosions des cadres, mouvements très amples…), mais une certaine maturité s’installe rapidement au fil des pages, et le côté un brin fou-fou et tape-à-l’œil se transforme alors en un style maîtrisé qui en met réellement plein la vue. Grâce à un trait précis, pointu, fouillé, et détaillé ; Taranzano nous offre une immersion parfaite dans l’époque et le lieux traversés par son héros. Nous pouvons presque sentir l’épaisseur du smog à Londres et l’odeur de l’encens dans les temples bouddhistes. Et dans les scènes d’action ce dessin s’associe à un cadrage et un découpage dynamique, nerveux et vif, qui nous emporte littéralement et fait siffler les balles de revolver à nos oreilles lors des courses poursuites à pied dans les marchés chinois bondés !
Le seul bémol (bah oui, malheureusement rien n’est jamais parfait) serait peut-être la colorisation par ordi’ – trop lisse, trop nette et un poil trop flashouille, et les effets spéciaux numériques ne collant pas vraiment à l’époque et à l’ambiance. On préfèrerait presque un noir et blanc simple et épuré qui mettrait mieux en valeur le joli travail d’ombrage de Taranzano, fort bien effectué et renforçant le côté mystérieux et inquiétant des protagonistes. Mais là, peut-être que je fais mon gourmand à cause des quelques pages en couleurs directes qui s’immiscent dans le tome 3 et dont le rendu est des plus appréciables !

Entre Indiana Jones pour l’aventure archéologique, X-files pour les mystères venus d’ailleurs, et la 9ème porte pour l’enquête ésotérique, les Portes de Shamballah est un réjouissant mélange des genres, au scénario intelligent, intéressant et intrigant, servi par des dessins réalistes collant tellement bien au sujet qu’ils ont même réussi à me séduire, moi… c’est dire !    ;o)

Les Portes de Shamballah, de Mazuer, Romano et Taranzano (ed. Clair de Lune).

Bonus :

E, S, O, T, E, R, I, S, M, et E… heu, 8 lettres : « érotisme ».
Et oui, ésotérisme pouvant facilement rimer avec érotisme, je ne saurais que vous conseiller d’acquérir la première édition du 3ème tome de Shamballah aggrémenté d’un carnet de nus.
Bah ouais, quand il s’agit de jolies filles à poil, là, le trait réaliste, j’le cautionne à 200% !

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  1. Pingback: Indiana Jones et le Royaume d’Aggartha

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