Chalut les humains,

Comment chat va pour vous ? Moi, chat va pas du tout…
Boustoune, mon maître bien aimé, m’inquiète au plus haut point depuis quelques jours…
Non seulement il ne s’occupe plus du tout de moi – avec toutes les critiques qu’il a constamment en retard, j’ai l’habitude… – mais en plus, son comportement devient franchement étrange. Jugez plutôt :

– Il est rentré dans une transe quasi-mystique, psalmodiant des mots bizarres tels que “Garmonbozia” ou “Silenzio”, priant Sainte Laura, Sainte Diane ou Sainte Betty…

– Il a mis des rideaux rouges partout dans l’appart’

– Il part travailler tous les matins sur une tondeuse à gazon, en écoutant à fond les manettes le “I’m deranged” de David Bowie – ça change du disque de Julee Cruise qu’il passe en boucle à la maison…

– Il s’habille en velours bleu, allez savoir pourquoi… Peut être parce qu’il n’a pas les moyens de s’offrir une veste en peau de serpent, symbole, je cite “de [son] individualité et de [sa] croyance à la liberté personnelle”…
Quand à sa coupe de cheveux, c’est un peu spécial… On dirait qu’il s’est greffé une fougère noire sur la tête…

– Il peut passer des heures à regarder le radiateur de la chambre…

– Il se ballade avec une bouteille d’oxygène pour se doper en cas de besoin…

– Il a emmailloté une carcasse de lapin dans un torchon et prétend que c’est son fils… Et il fait la causette à la bûche en bois qui sert à tenir le sapin de Noël…

Oui, je vous le dis : il déconne grave ! Complètement maboul, le gars… Bon pour un vol plané au-dessus d’un nid de coucous, avec crash assuré…

Et tout ça pour quoi ? Parce que David Lynch – que dis-je : Maîîître David Lynch – son idole, son gourou, sa sardine, sa Sardaigne, sa boîte de douze, bref, son Dieu vivant, vient à Paris pour inaugurer l’hommage que lui rend la Cinémathèque Française, du 13 au 31 octobre…

David Lynch

Au programme de cette rétrospective, l’intégrale des oeuvres cinématographiques du plus barré des cinéastes américains – tous ses longs métrages, d’Eraserhead à INLAND EMPIRE, en passant par Mulholland drive et Lost Highway, et tous ses courts – aussi bien les tous premiers Six men getting sick, The Amputee que les derniers, comme Darkened room ou Rabbits.

Plus les deux épisodes de Hotel room qu’il a réalisés et le pilote de la série On the air. Plus deux documentaires, sur son oeuvre, et sur la genèse d’Eraserhead. Plus quelques-unes de ses publicités, de ses clips et de l’objet musico-filmique qu’il a réalisé avec Julee Cruise – Industrial Symphony No. 1: The Dream of the Brokenhearted.
Sans oublier une nuit Twin Peaks avec projection de l’intégralité de la saison 1 – la meilleure.

Twin Peaks

Prévoyez déjà plusieurs boîtes d’aspirine pour soulager vos cerveaux qui ne manqueront pas d’entrer en ébullition après une telle orgie de cinéma (expéri)mental…
Bon je reconnais que le programme est fort alléchant. Il comblera les fans comme les profanes, qui pourront s’initier en douceur avec les oeuvres les plus “soft” de ce génie du 7ème art : Dune, Elephant man, Une histoire vraie et, dans une moindre mesure, Blue Velvet

Là, j’aurais pu laisser mon maître vous faire l’éloge de son cinéaste préféré, mais ça aurait pris des heures, et il est tellement inconditionnel du bonhomme qu’il n’est plus très objectif… Alors voici le texte de présentation du cycle, publié sur le site de la Cinémathèque Française
“La grande révélation du cinéma américain des trente dernières années. David Lynch a inventé un univers autonome et onirique, étrange et angoissant, teinté de surréalisme. Homme aux multiples talents (peintre, musicien, photographe), il bouleverse la fiction cinématographique hollywoodienne en subvertissant les conventions par des audaces narratives et plastiques sans précédents. Après l’expérience, un brin traumatisante, d’Eraserhead, Elephant Man revoit avec distance et empathie les récits de monstres, Blue Velvet, Sailor et Lula, Lost Highway et Mullholland Drive subvertissent les conventions en transformant la réalité en un monde ésotérique et mystérieux, séduisant et inquiétant, traversé par des forces occultes et des mouvements souterrains. Le cinéma de Lynch est un univers mental, une plongée au cœur de la psyché humaine qui n’a pas d’équivalent aujourd’hui”
Ah tiens, c’est aussi super élogieux…

mulholland-drive_l

Bon OK, mais c’est pas une raison pour se mettre un sac en papier sur la tête et gueuler à tue-tête “Je ne suis pas un animal…”.
Ah! Je vous le dis, vivement la fin de cette rétrospective, que tout redevienne normal (euh, enfin, comme avant quoi…).
En attendant, je vais essayer de souffler un peu, parce que moi, le cinéma lyn-chien, allez savoir pourquoi, ce n’est pas trop ma tasse de thé… (Je préfère Cha-plin, Cha-brol, Cha-liapine…). Mais que ça ne vous empêche pas d’y aller, hein! C’est quand même un sacré metteur en scène qui est honoré, là…
Vous trouverez infos et programme complet en suivant ce lien : Cycle David Lynch

Bon, je vous laisse… Je cours me planquer – et j’emmène l’extincteur avec moi – parce que là, il craque des allumettes en répétant “Le feu marche avec moi”… Ca fout les jetons… Complètement psycho, j’vous jure…

Allez, Chalut les humains…
Pleins de ronrons,
Scaramouche

scaramouche eraserhead

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Scaramouche est un... chat. Son heureux maître, Boustoune, l'a baptisé ainsi après l'avoir vu escalader les rideaux et pratiquer l'escrime contre les plantes vertes, à la manière d'un héros de film de cape et d'épée. (Il a longtemps hésité avec Channibal et Cat Vador, mais bon...) Evidemment, avec un tel nom, l'animal ne pouvait que devenir cinéphile. Comme il n'avait rien d'autre à faire que de glander toute la journée sur le canapé, il s'est gavé de DVD et s'est forgé sa culture cinématographique, avant d'accepter de devenir critique pour Angle[s] de vue. Sa spécialité ? Les films dont les félins sont les héros. Et les films qui parlent de boxe et de sports de combat (il kiffe). Mais il doit aussi se farcir la plupart des critiques de films pour enfants (il kiffe aussi, sans l'avouer...). Il aime donner quelques coups de griffes aux films qu'il n'aime pas, et complimenter ceux qu'il aime de sa plus belle plume (volée à un pigeon trop téméraire). En tout cas, il n'aime pas les critiques qui ronronnent. Qu'on se le dise...

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