– La guerre, de Thomas Cadène & Loïc Sécheresse –

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Première page : un jeune couple se dispute en voiture. Pas besoin de textes pour comprendre leur état de tension extrême, le dessin hyper expressif de Loïc Sécheresse se suffit amplement à lui-même.
La femme explose, quitte la voiture, et se retrouve en plein milieu d’une route de campagne battue par les averses et les vents ; les gouttes de pluie se mélangeant aux flots de larmes sur son visage déformé par les sanglots. Son mari tempête, lui demande de reprendre raison et de remonter en voiture. Trop tard : une seconde voiture remplie d’une bande de lascars défoncés déboule à toute balle, l’esquive de peu, mais enchaine les tonneaux et finit totalement explosées dans le fossé… aucun survivant à son bord.

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Quelques pages plus tard : un mariage de bourges, dans un lieu clinquant pour bourges, où des bourges se gavent insouciamment de mets de bourges en échangeant sur leurs petites préoccupations de bourges, entrecoupées d’insipides vannes de bourges… Les couleurs de Sécheresse, bigarrées et flashy, reflètent au mieux les strass et paillettes du monde résolument de bourges dans lequel évoluent les jeunes époux… pourtant, la mariée ne parvient pas à se complaire dans ce bonheur de pacotille, les tripes remuées par ces morts qui hanteront constamment sa conscience… le coup de volant lui sauvant la vie ayant par ricochet pris la leur.

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Comment oublier un tel évènement ? Impossible.
Comment reprendre le cours de sa petite vie tranquille comme si de rien n’était ? Impossible.
Comment vivre lorsque l’on a regardé la mort dans les yeux ? Afin de se sentir vivant, de ressentir, de re-sentir, le jeune couple se lancera dans une quête d’expériences émotionnelles toujours plus intenses sans jamais se soucier du fait que celles-ci soient morales ou amorales, dangereuses ou non pour leur personne, pour leur couple ou pour autrui… révélant ainsi leurs penchants les plus morbides et malsains !

Une descente aux enfers superbement traduite tant verbalement que graphiquement, la symbiose entre le texte et le dessin étant ici à l’apogée ; le sens des dialogues de Cadène fusionne viscéralement au trait de Sécheresse, à la fois sauvage et libre, vibrant et vivant, sensuel et violent, sur certaines cases carrément même difforme et dérangeant lorsque les visages se transforment sous le coup de la haine et de la fureur ! Mention spéciale également pour le travail sur les couleurs, parfois si vives et lumineuses, d’autres fois charbonneuse, sombres et étouffantes… et chaque fois parfaitement au service de l’ambiance si particulière imposée par le scénario !

Un duo d’auteur au top pour un album qui prend directement aux tripes !

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La guerre, de Thomas Cadène & Loïc Sécheresse (Ed. Delcourt)
(Ed. Delcourt)

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