– Jeu de gamins (Tome 1), de Mikaël Roux –

Mickaël Roux a un talent évident, un style reconnaissable au premier coup d’œil, dont les influences burtoniennes sont désormais digérées, et pourtant on entend assez peu parler de son travail. Sans doute est-ce par ce qu’il n’appartient pas vraiment à une mouvance et qu’il travaille sans distinction aussi bien pour des petits éditeurs alternatifs (Charrette, La Joie de lire, de nombreux fanzines) que des éditeurs industriels (il est dans tous les Lanfeust Mag). Ces choix étonnants sont simplement la marque d’un auteur éclectique, qui est assez habile pour réussir à faire ce qu’il veut même sous la contrainte.

Jeu de gamins étrenne la collection « enfant » de Bamboo. Heureusement cette collection n’a pas pour but de faire des versions rajeunies des séries phares de l’éditeur : pas de petits gendarmes, petits profs, petits pompiers… La série de Roux a un axe bien à elle, assez bien trouvé d’ailleurs : dans chaque volume nous suivrons une bande de gamins jouant à être quelque chose. Dans ce volume ci, ils jouent aux pirates, et son dessin, maintenant bien affirmé, y fait merveille, rehaussé par de délicates couleurs de Dawid, un de ses vieux partenaires. Assurément, il y a là un filon permettant de lancer une série.

 

Il y a surtout de quoi jouer, comme l’avait déjà fait l’auteur dans son superbe Lisa (MPF éditions), sur la confrontation entre imaginaire et réel. Tous les gags voient s’affronter les mondes rêvés et le monde concret, pas dans une alternance binaire mais bien dans une vision simultanée. Quand un enfant, debout dans un carton/bateau va déplacer un pot de fleur pour simuler le mouvement de son esquif, il voit réellement une île et il n’y a que le lecteur pour constater le décalage. Pourtant, malgré ce décalage qui peut faire sourire, Mickaël Roux ne se moque jamais de son sujet. Il le montre avec habileté, et une certaine tendresse, annulant aussitôt toute tentative de jugement sur le dérisoire de l’action.

Ainsi, les enfants affrontent bien des requins et des tempêtes autant que leurs parents et l’école, et une véritable poésie de l’imaginaire se dégage à la lecture. Le monde des cowboys est annoncé pour le tome 2, on attend avec impatience de voir ce qu’il inspirera à cette bande de copains métamorphosant le monde à leur guise, et que le lecteur suit sans hésitation.

Jeu de gamins, Tome 1, de Mickaël Roux (ed. Bamboo).

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