Bureaux d’Angle[s] de vue, le 18 janvier 2013

– Bon, Smithers, tu voulais écrire pour notre équipe rédactionnelle? Voilà ta chance. Je t’ai choisi pour faire la chronique de ce film qui passe en avant-première ce soir : Pas très normales activités. Pas la peine de me remercier. Au boulot, gros…
– Euh… Pitié, patron. Tout mais pas ça! J’ai détesté Paranormal activity. Je n’aime pas les parodies lourdingues façon Scary movie, ni les comédies franchouillardes. Je n’aime pas non plus les précédents films de Maurice Barthélémy. Et je n’ai jamais été un grand fan des Robins des Bois. Pourquoi tant de haine, hein? Pourquoi ?!? Monde cruel!!!
– C’est toi qui y va parce qu’on est tous comme toi à la rédac’. On ne le sent pas trop le film. Alors pour un bizutage, c’est le truc rêvé. Hum… Enfin, non… Euh… Je veux dire que c’est une mission de haute confiance que je te confie là. Allez! Va, cours, vole et débrouille-toi…

Pas très normales activités - 5

Pfff… Tu parles… Super! Aller à l’autre bout de Paname pour voir un film qui ne m’inspire pas du tout. Et en plus il fait froid… Et il neige à gros flocons… Mode Alaska. Allez on s’en fout, on n’y va pas. On n’a qu’à s’cacher sous les draps. Non? Pffff…
Bon, je brave la tempête, les métros qu’ont froid aux grelots, les ptits cons qui me balancent des boules de neige. Je me risque dans l’escalier super glissant de l’UGC Ciné-Cité Bercy. Ca me saoule déjà.
Puis je me fraie un passage dans la foule de spectateurs en train d’acheter billets et popcorns, jusqu’au pupitre des invitations.  Le type a l’air paniqué. Il est en train de se dire qu’il n’y aura pas assez de places pour tous ceux qui sont sur la liste. Ouf! J’obtiens quand même ma place. Je l’aurais eue mauvaise de m’être aventuré jusqu’au ciné pour rien.
Arrivée dans la salle. Que des petits jeunes. Je me sens vieux, d’un coup. Tous trépignent d’impatience. Ils attendent de voir Norman. Norman ??? Qui c’est celui-là? Connais pas… Je demande à mon voisin de m’éclairer. “Oh, sérieux, M’sieur. Vous connaissez pas Norman? C’est une star sur internet. Il fait des vidéos sur Youtube. Rhooo, le bolosse” (1). Ah bon? OK, au temps pour moi… Je me sens très vieux, d’un coup.
Le temps de changer de place pour éviter d’être assis juste derrière un spectateur en mode Jackson Five géant. 2m10 et coupe Afro que même en perruque de farces et attrapes, tu la trouves pas, et l’équipe du film arrive sur scène pour présenter rapidement le film. Chaude ambiance. De quoi faire fondre la banquise qui est en train de se créer dehors.

Pas très normales activités - 3

Le film démarre et la première scène donne le ton général. Les héros du film, Octave et Karine (Norman Thavaud et Stefi Celma), un jeune couple, décident de filmer quelques moments de leur intimité avec un pomme-phone (placement de produit n°1), afin de laisser à leurs futurs enfants un témoignage de l’époque où ils ont été conçus. Mais ils en profitent surtout pour faire un peu n’importe quoi  devant la caméra, comme chanter du Adamo en version créole.
Soucieux de faire grandir leur future progéniture dans un cadre de vie sain, ils emménagent à la campagne, au fin fond de la Creuse, dans la ferme de la grand-mère d’Octave, récemment décédée. Le jeune homme veut profiter de cette mise au vert pour se remettre à peindre ses toiles pendant que la jeune femme peint, elle aussi – les murs de la maison pour la redécorer à son goût. Mais l’adaptation à la vie champêtre est difficile, entre le générateur électrique qui connaît quelques ratés, l’absence de chauffage dans la maison et la mère de Norman qui appelle à 4h du matin pour savoir si tout se passe bien… De quoi occasionner quelques prises de bec au sein du couple. En fait, la – relative – bonne surprise vient du fait que le film se construit surtout autour de cette relation de couple agitée , entre la volcanique Karen, adepte du beau et du bio, et le lymphatique Octave, adepte de pâte à tartiner aux noisettes et de biscuits sablés chocolatés (placements de produit n°2 et 3), plutôt que de verser dans le spoof-movie à l’américaine.
Le film consiste en une succession de sketchs courts filmés en plan fixe, et évoque deux formats télévisuels :“Scènes de ménage” et “Un gars une fille” [et les sketchs de Norman sur internet, me souffle le Germain Jackson assis dans la rangée de devant]. Comme les deux séries en question, ce n’est pas toujours drôle ou toujours très inspiré, mais c’est relativement bien fichu, avec des répliques amusantes ou des situations cocasses.

Pas très normales activités - 4

Bien sûr, il y a aussi une partie parodique où Barthélémy et ses acteurs se moquent gentiment de Paranormal activity , ses portes qui claquent et ses draps qui se soulèvent tout seuls, mais aussi d’autres films d’horreur, comme Amityville, L’Exorciste ou Razorback. Plus le film avance et plus il bascule dans le grand n’importe quoi scénaristique – avec notamment une histoire débile de grippe aviaire et de cochons revenants – mais, à la différence du film d’Oren Pelli, on ne s’ennuie pas.
Mieux, il arrive sans peine à être plus flippant que le film dont il s’inspire, avec les apparitions surprises de Rufus, en vieux fermier mutique et menaçant qui détient la clé de l’énigme.

Bon, soyons clairs. Pas très normales activités ne casse pas trois pattes à un canard, ni même deux à un cochon fantôme. Il ne s’agit pas d’un chef d’oeuvre du septième art, ni d’un grand film ou une grande comédie. C’est une comédie sans prétention, à petit budget et à équipe réduite qui s’appuie sur un duo de jeunes acteurs attachant et deux ou trois seconds rôles solides, dont Rufus (qui semble s’être bien amusé à jouer ce fermier frappé par une étrange malédiction) ou François Bureloup (impayable en sourcier-charlatan. Après, on peut aimer ou détester.
Perso, il y a plusieurs trucs que je n’ai pas aimé, comme le placement de produit grossier et très appuyé (Aïe-Phone/Nuts-hello/Gran-hola), quelques gags lourdingues et le personnage du vidéaste-exorciste vicelard, joué par Maurice Barthélémy lui-même. L’ensemble manque d’envergure et je ne peux pas dire que j’ai ri aux éclats…
Mais j’ai beaucoup souri et ce n’était pourtant pas gagné au départ. Je dois bien avouer qu’au final, j’ai passé une assez bonne soirée et que le film m’a agréablement surpris.

Pas très normales activités - 2

Je retourne au bureau sous la neige, tout émerveillé par le spectacle, sourire aux lèvres. Le métro a toujours froid aux grelots et peine à me ramener à bon port mais je suis bien. Arrivé à destination, le chef me demande :
– Alors cet article? Tu vas me dézinguer ce nanar?
– Euh, non, non, non… J’ai trouvé ça plutôt sympathique comme film. Euh, pourquoi vous me regardez d’un air aussi bizarre?
– Scaramouche, va me chercher une corde… PaKa, appelle-moi un exorciste… Il est possédé le petit, là. C’est pas normal…
– Mais non. Hé! Au secours! Au secours!

(1) : Norman fait des vidéos

_______________________________________________________________________________

Pas très normales activités Pas très normales activités
Pas très normales activités

Réalisateur : Maurice Barthélémy
Avec : Norman Thavaud, Stefi Celma, Rufus, Maurice Barthélémy, François Bureloup
Origine : France
Genre : un gars, une fille (et des cochons fantômes) 
Durée : 1h24
Date de sortie France : 30/01/2013
Note pour ce film :  ●●●○○○
Contrepoint critique : TF1 News

______________________________________________________________________________

LEAVE A REPLY