Vu son affiche (assez laide), qui montre deux tourtereaux riant sous la pluie et revendique haut et fort la filiation de films comme Le Journal de Bridget Jones et Coup de foudre à Notting Hill, on s’attendait à ce que Il était temps soit une énième comédie romantique à l’eau de rose, axée autour des tourments sentimentaux d’un ou plusieurs personnages attachants, mais pas très à l’aise en ce qui concerne les élans du coeur.

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Effectivement, le personnage principal, Tim (Domhnall Gleeson) est un jeune homme complexé par son physique de rouquin gringalet et très maladroit avec les femmes, ce qui le contraint à un célibat pesant. Le film suit ses efforts pour séduire deux jeunes femmes.
D’abord la divine Charlotte (Margot Robie), une jeune femme hébergée le temps d’un été dans le cottage familial, dans le sud de l’Angleterre.
Ensuite la non moins ravissante Mary (Rachel McAdams), rencontrée à Londres, un peu plus tard, à l’occasion d’un dîner dans le noir…
Comme le veulent les codes du genre, le garçon va tenter sa chance, gaffer, se prendre un râteau (voire plusieurs) et échafauder de nombreuses stratégies pour tenter de conquérir le coeur de ces ravissantes créatures, tel le coyote fondant sur Beep-Beep, jusqu’à ce qu’il soit finalement récompensé, pour le plus grand plaisir des spectateurs…
C’est donc assurément une comédie romantique, avec ce qu’il faut de charme et de légèreté, plus quelques embûches et quiproquos pour pimenter l’ensemble. Mais ce n’est pas que cela…

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Assez vite, le scénario s’enrichit d’un versant fantastique. Le jeune héros apprend qu’il est doté, comme son père et ses ancêtres, d’un don très particulier : l’aptitude de voyager dans le temps, pour influer, non pas sur le cours de l’Histoire, mais sur celui de son histoire personnelle. Il lui suffit de s’isoler dans le noir, de serrer les poings et de penser à un moment spécifique de son existence pour y retourner et faire les choses différemment. Une gaffe? Hop, un saut dans le temps pour l’éviter. Un regret? Hop, il peut corriger le tir et prendre d’autres options, autant de fois qu’il le veut.
En matière de séduction, c’est bien pratique, même si cela ne suffit pas à forcer l’être aimé à tomber dans vos bras…
Mais cela peut servir aussi à d’autres choses : à aider un ami en difficulté, à éviter certains drames, à ajuster certains détails bénins qui rendent la vie plus belle…

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Ce qui nous amène au troisième aspect du film : un mélodrame familial poignant, axé autour de problématiques assez universelles.
Tim se retrouve confronté à la vie de couple, à la tentation de l’adultère, à la paternité. Il est amené à réfléchir à ses relations avec ses proches – sa soeur et ses parents –  et à la définition du bonheur…

Wow… Tout ça dans le même film? Un peu trop ambitieux et risqué, non?
Eh bien non, cela passe sans problème.
Grâce, déjà, au talent de Richard Curtis, qui maîtrise parfaitement le tempo de la comédie dramatique et sait alterner répliques percutantes, passages romantiques pas trop mièvres et pics dramatiques dénués de pathos.

Grâce, aussi, à ce charme so british, cette petite différence qui rend les comédies d’Outre-Manche bien plus fines et élégantes que leurs homologues made in France. Loin de nous l’idée de taper sur notre cinéma hexagonal, mais force est de constater que nos voisins britanniques ont un don pour réussir ce genre de films, comme les espagnols excellent aujourd’hui dans le registre du fantastique.

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Grâce, enfin, aux acteurs, tous impeccables.
Le jeune Domhnall Gleeson n’a peut-être pas le physique de playboy d’un Hugh Grant, par exemple,  mais il n’en est pas moins charismatique, et doté d’un humour souvent irrésistible.
Tout comme il est bien difficile de résister au(x) charme(s) de ses partenaires féminines. Rachel McAdams, Margot Robie, Vanessa Kirby et Lydia Wilson rivalisent de grâce, de beauté et d’élégance. Il faut bien cela au mâle hétérosexuel pour éviter de virer sa cuti face à l’irrésistible présence de Bill Nighy, l’acteur-fétiche du cinéaste. Il crevait l’écran en rocker au coeur tendre dans Love actually ou en capitaine de bateau non moins rock’n roll dans Good Morning England. Il est une fois de plus génial en père de famille protecteur et aimant, essayant juste de transmettre à sa progéniture le secret du bonheur.

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C’est ce qui ressort, au final de cette histoire aux multiples ramifications. Même quand on a la possibilité de voyager dans le temps, la vie est bien trop courte, et elle n’est pas toujours une partie de plaisir. Il y a des moments joyeux et des moments tristes, des choses que l’on voudrait figer à jamais et d’autres que l’on aimerait pouvoir oublier. L’existence est jalonnée de moments difficiles, où il faut prendre des décisions cruciales et les assumer jusqu’au bout. On peut se tromper, on peut prendre des chemins de traverse. Ce qui importe, c’est d’essayer de profiter à fond de chaque moment, d’essayer de rendre les choses positives, joyeuses, et de communiquer cette joie de vivre à ses proches, jusqu’à son dernier souffle.
Oui, d’accord, écrit comme cela, ça ressemble à de la morale bon marché, assez insipide. Mais là encore, il n’en est rien. Le film réussit le petit miracle de nous émouvoir avec cette ode au “carpe diem” tout en nous regonflant le moral à bloc. Le raffinement britannique, on vous dit…

Seul bémol à notre enthousiasme, quelques petits soucis de cohérence au niveau du script. C’est le problème avec les voyages dans le temps, les hiatus spatio-temporels provoquent souvent des hiatus scénaristiques…
Déjà, l’argument général du film ne tient pas, puisqu’avec le don qu’il possède et cette faculté d’aller et venir à sa guise dans son passé, le jeune héros devrait être en mesure de régler ses problèmes de façon bien plus efficace et rapide…
Mais bon, on ne va pas chipoter. Il faut prendre le scénario comme il est. Le rythme du film fait que l’on n’a pas vraiment le temps de se poser des questions.

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Il était temps…
Oui, il était vraiment temps de saluer le talent de Richard Curtis, scénariste et dialoguiste souvent inspiré et cinéaste plus qu’honorable.
On ne possède pas le don de voyager dans le temps pour nous rendre la vie plus facile, hélas, mais, en cas de coup de blues ou de coup de fatigue, on peut toujours voir ou revoir ses films, ses délicieuses comédies, afin de prendre une bonne bouffée d’oxygène et de bonne humeur.
Thank you Mister Curtis.

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Il était temps Il était temps
About time

Réalisateur : Richard Curtis
Avec : Domhnall Gleeson, Rachel McAdams, Bill Nighy, Lydia Wilson, Margot Robbie, Tom Hollander
Origine : Royaume-Uni
Genre : comédie romantique, mais pas que…
Durée : 2h03
Date de sortie France : 06/11/2013
Note pour ce film : :●●●●●
Contrepoint critique : L’Express

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