Chalut les humains,

Ah ben quand même, c’est pas trop tôt !
Enfin un film qui parle d’autre chose que de toutous à leur mémère, de poissons clowns, de volatiles stupides ou d’histoires d’humanoïdes compliquées.
Comme l’indique le titre de leur long-métrage, Keith Scholey et Alastair Fothergill nous offrent une belle promenade en compagnie des représentants du genre le plus noble du règne animal, le plus classieux, le plus beau : celui des Félins.

Félins - 5  

Bon disons-le tout de suite, ils ont commis la faute de goût de ne filmer que les brutes épaisses de la famille, mes cousins les lions, les guépards, les servals, plutôt que de centrer leur récit autour des chats domestiques dont je suis l’un des plus illustres représentants. Mais il ne faut pas leur en vouloir. On comprend qu’ils aient préféré partir tourner à l’aventure en Afrique, au Kenya, sur les terres du roi des animaux… 

Là, je vois déjà certains maugréer dans leur coin : “mouais… encore un documentaire animalier, quoi… A quoi bon aller voir ça au cinéma?”.
Hé bien, déjà parce que la projection sur grand écran amplifie les sensation et restitue le caractère majestueux de l’Afrique sauvage, la beauté des paysages et des animaux, filmés au plus près grâce aux nouvelles avancées techniques des caméras.
Ensuite et surtout parce que justement, Félins c’est du cinéma! 
Ce n’est pas “juste” un documentaire animalier de plus, mais un vrai film d’aventures, construit comme une fiction avec une intrigue captivante, des personnages attachants, du suspense, du drame, de l’émotion.

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Cela dit, attention, l’épopée relatée à l’écran n’est pas artificielle. Elle n’est pas le fruit de l’imagination d’un scénariste. Les cinéastes se sont contentés de filmer les félins sauvages dans leur habitat naturel. Tout leur talent a été de choisir le casting parfait, grâce à leur excellente connaissance des comportements animaux et des rapports de force au coeur du Masai Mara.
Pour les lions, ils ont opté pour une tribu ne comportant qu’un seul mâle adulte, sur le déclin, et donc fragilisé par rapport à d’autres tribus plus puissantes.
Pour les guépards, ils ont sélectionné une femelle issue d’une lignée solide, qui arrive fréquemment à protéger ses petits jusqu’à l’âge adulte.
Une fois les “stars” choisies, il ne restait plus qu’à attendre patiemment les situations intéressantes offertes par la vie sauvage.

Le film propose de suivre les aventures périlleuses de deux familles de félins, situées chacune sur une rive du fleuve Mara, qui sillonne la vallée du Masai.

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Au nord, c’était les corons… Euh, non, j’déconne…
Au nord, il y a Sita, une femelle départ qui élève seule ses cinq petits. Une gageure, quand on sait que seuls 5 % des bébés guépards ont la chance d’atteindre l’âge adulte.
Il faut dire qu’avant d’être ces superbes sprinteurs capables de mettre la misère à Usain Bolt au 100 mètres, ces animaux incroyables capables de ne pas prendre un seule pet de graisse tout en s’empiffrant de cornes de gazelle, leur péché mignon, ce sont des petites boules de poils sans défense, à moitié aveugles et aussi indisciplinées et fofolles que des chatons (c’est dire!). Les bébés guépards peuvent facilement se perdre et tomber sur un des nombreux prédateurs qui peuplent les lieux : hyènes, vautours, voire les félins eux-mêmes… Les salauds! S’attaquer à des petites choses aussi craquantes!

Au sud, c’est le territoire d’une tribu de lions, celle de Fang.
On l’a nommé ainsi à cause d’un de ses crocs cassés, témoignage de sa bravoure et de son sens du sacrifice. Il règne en maître sur son territoire et ce n’est pas le roi des animaux pour rien, croyez-moi. Pour preuve, il n’y a qu’à voir comment il calme les ardeurs d’un crocodile un peu trop gourmand et téméraire, d’un simple rugissement!
Seul mâle adulte de la troupe, c’est aussi à lui d’assumer la protection de ses femelles et de sa progéniture.
Parmi les membres de sa tribu, il y a Layla, une vieille lionne fatiguée par des parties de chasse éprouvantes (c’est comme chez les humains, ce sont les femelles qui s’occupent du repas et c’est le mâle qui s’empiffre…). Elle est clairement un fardeau pour la tribu, qui a décidé de ne plus s’occuper d’elle. Mais elle s’accroche, surtout pour s’occuper de sa fille Mara, trop jeune pour participer pleinement aux activités du groupe et pour se défendre toute seule.

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Et les dangers ne manquent pas, à commencer par la puissante tribu de lions situé de l’autre côté de la rive.
Menée par le redoutable Kali (nommé comme cela parce qu’il a une aussi grande gueule qu’un certain chanteur français… Enfin, j’imagine…) et ses quatre fils, adultes et en pleine forme, elle cherche à agrandir son territoire et lorgne donc avec avidité sur le domaine d’un Fang vieillissant et isolé.
L’attaque du royaume le plus faible par le plus fort est inéluctable.

D’un côté, une variante de “Mère courage et ses enfants”. De l’autre, une tragédie shakespearienne, version “live” et réaliste du Roi Lion… Voilà de quoi façonner une trame narrative solide, d’autant plus convaincante qu’elle directement tissée par Dame Nature. Et d’autant plus touchante qu’elle tourne autour des liens unissant les mères et leurs petits : Layla se sacrifie pour Mara, qui, de son côté, se refuse à quitter sa mère quand celle-ci, blessée et à bout de forces, est abandonnée par le reste du groupe. Sita défend ses bébés contre des animaux plus costauds qu’elle, dont Kali et ses rejetons. 
Et je vous mets au défi de ne pas être émus à l’écoute du cri déchirant qu’elle lance, la nuit, pour appeler ses enfants égarés.
(Sniff… Hé, non, je ne pleure pas, c’est juste que j’ai un peu les yeux chassieux en ce moment.)

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Avec la mauvaise foi qui me caractérise dès que je parle de mes congénères, je devrais dire non sans aplomb qu’il s’agit là du premier chat d’oeuvre de l’année cinématographique. Mais il paraît que je dois rester un minimum objectif, alors je dois aussi parler des défauts de ce film. Car il y en a.

Déjà, il faut admettre que, si l’on trouve touchant les jeux des bébés guépards (je vous ai dit que je les trouvais craquants ?) et qu’on est impressionnés par la beauté des scènes de chasse, magnifiquement captées par la caméra de Sophie Darlington (je vous ai dit que mon coquin de maître la trouvait craquante ?), au bout de quelques minutes, on peut trouver cela répétitif et un brin ennuyeux.
Le rythme s’en ressent, la narration devient un peu molle du gnou, ce qui est un comble…
Et puis, surtout, la voix-off de Pascale Elbé plombe un peu le truc. On lui saura gré d’avoir opté pour un commentaire rare, laissant les images parler d’elles-mêmes plutôt que de nous abreuver de détails zoologiques. Mais les quelques phrases balancées par-ci par-là, peu inspirées, semblent finalement assez inutiles et pas vraiment en phase avec la belle intrigue shakespearienne proposée par la nature.

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Mais attention, hein, ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit. Le film reste un bon film d’aventures animalières qui est susceptible de plaire à un large public.
Ah oui! Précision utile : le film n’est pas trop violent. Comme la plupart des productions Disney oblige, il vise un public familial le plus large possible et les réalisateurs ont pris garde de ne pas trop insister sur la férocité des scènes de prédation et de bagarres entre animaux. Tout est relativement “soft”.
Ne craignez donc pas un déluge d’hémoglobine ou à des carnages dégoûtants. En revanche, comme la savane sauvage n’est pas le pays des Bisounours, inutile de préciser qu’il y a quelques morts à déplorer, chez les antilopes, les gnous, les zèbres et les félins…
Enfin, ça, c’est l’histoiiiiiire de la vie, comme on le chante dans Le Roi Lion

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Bref, Félins est un film original, entre documentaire et fiction.
C’est un beau film, car ses images sont sublimes.
C’est un film émouvant, qui donne à réfléchir sur les moyens de préserver cette vie sauvage. 
En plus, il y a plein de félins dedans, donc, c’est bien et pis c’est tout, na!

Bon, faut que je vous laisse, mon maître vient de rentrer. Il faut que je teste sur lui ma nouvelle technique de chasse. Hé hé…
Et toi là, le lecteur qui ricane derrière son écran et qui me prend pour un dingue. Approche un peu, que je te file un coup de patte griffu! Tu vas voir si je ne suis pas un animal sauvage…

Pour les autres, plein de ronrons,

Scaramouche

Scaramouche

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Félins Félins
Wild cats

Réalisateurs : Keith Scholey, Alastair Fothergill
Avec la voix de : Samuel L. Jackson (en version originale), Pascal Elbé (en version française) 
Origine : Etats-Unis,
Genre : Le vrai Roi Lion
Durée : 1h27
Date de sortie France : 01/02/2012
Note pour ce film : ●●○○
contrepoint critique chez : Studio Ciné Live

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Scaramouche est un... chat. Son heureux maître, Boustoune, l'a baptisé ainsi après l'avoir vu escalader les rideaux et pratiquer l'escrime contre les plantes vertes, à la manière d'un héros de film de cape et d'épée. (Il a longtemps hésité avec Channibal et Cat Vador, mais bon...) Evidemment, avec un tel nom, l'animal ne pouvait que devenir cinéphile. Comme il n'avait rien d'autre à faire que de glander toute la journée sur le canapé, il s'est gavé de DVD et s'est forgé sa culture cinématographique, avant d'accepter de devenir critique pour Angle[s] de vue. Sa spécialité ? Les films dont les félins sont les héros. Et les films qui parlent de boxe et de sports de combat (il kiffe). Mais il doit aussi se farcir la plupart des critiques de films pour enfants (il kiffe aussi, sans l'avouer...). Il aime donner quelques coups de griffes aux films qu'il n'aime pas, et complimenter ceux qu'il aime de sa plus belle plume (volée à un pigeon trop téméraire). En tout cas, il n'aime pas les critiques qui ronronnent. Qu'on se le dise...

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