Ces dernières années, nous avons eu droit à de nombreux remakes ou “reboot” de classiques du film d’horreur, de Vendredi 13 à Halloween, en passant par The Thing, Massacre à la tronçonneuse, Les griffes de la nuit et autres Maniac. Il était donc logique qu’Evil Dead, oeuvre culte du ciné fantastique des années 1980, soit à son tour remis au goût du jour.
Comme on n’est jamais mieux servi que par soi-même, c’est Sam Raimi, le réalisateur du métrage original, qui s’est chargé de produire cette version 2013, via sa compagnie Ghost House. Il a aussi participé à l’écriture du scénario, confié aux soins de Diablo Cody. La mise en scène, en revanche, a été laissée à l’un de ses disciples, Fede Alvarez.

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Le scénario se veut assez proche du film original. En tout cas, le principe est le même : cinq jeunes gens – 2 hommes et 3 femmes – partent se mettre au vert dans une cabane isolée, perdue au fond des bois. Là, ils tombent sur un ouvrage de magie noire, le “Naturom Demonto”, le lisent à haute voix et ouvrent sans le savoir les portes de l’enfer, libérant un démon bien décidé à s’amuser un peu. 
Au menu : Arbre violeur, possessions maléfiques, bagarre contre des zombies à coups de couteau, de pistolet à clous ou de tronçonneuse… La nuit va être longue et éprouvante pour les personnages principaux… 

On aurait aimé que le film soit aussi éprouvant pour le spectateur, conformément aux promesses de l’affiche française, vantant rien moins que “l’expérience cinématographique la plus terrifiante”. Hélas, on est loin du compte…
Le problème, c’est que cette histoire de week-end dans une vieille bicoque au fond des bois, en compagnie de démons revanchard, on a vu ça des dizaines de fois depuis l’Evil dead de Sam Raimi, lui-même variation du thème ultra-classique de la maison hantée. L’effet de surprise ne joue plus.
Sans doute pour compenser cela, Fede Alvarez a opté pour la surenchère au niveau des effets gore et des hectolitres d’hémoglobine versés – une pluie de sang, au sens propre, s’abat sur les personnages. Mauvaise idée, car en choisissant l’horreur démonstrative plutôt que l’horreur suggestive, il désamorce le potentiel angoissant des situations, qui était l’un des points forts du film original.

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Autre mauvaise idée, scénaristique celle-là, avoir voulu à tout prix trouver une bonne raison à ce séjour en forêt.
Si ces cinq jeunes viennent s’enfermer une semaine dans une cabane moisie perdue au milieu de nulle part, ce n’est pas par amour du camping ou des balades en forêt mais pour aider la jeune MIa à vaincre son “démon personnel” (arf) – son addiction aux drogues dures. 
Et si la demoiselle a pris l’habitude de se shooter, c’est pour mieux supporter un lourd trauma familial que son grand-frère, lui aussi présent pour cette virée en forêt, a lâchement fui. Et pouf, en deux coups de cuiller à pot, on se retrouve avec un beau propos moralisateur – la drogue, c’est de la merde – et un règlement de comptes familial – mais pourquoi m’as tu abandonnée? sniff… Tout ceci fait tendre le film vers une approche très “premier degré” qui tranche avec l’esprit du film original, bien plus fun, et qui, disons le clairement, plombe l’ambiance.

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Ajoutons à cela des acteurs principaux très fades en comparaison de Bruce Campbell, le charismatique Ash de la trilogie Evil Dead originale, une BO envahissante et des twists narratifs assez ridicules, et le tableau sera complet…
Ah non tiens, on a oublié de mentionner le petit détail qui permet à ce remake plus que moyen de se distinguer des autres films d’horreur. Dans ce genre d’histoire, il y a toujours un  personnage agaçant, l’intello tête à claques ou le neuneu lubrique, dont la disparition va faire grand plaisir aux spectateurs. 
Ici, le personnage irritant est un blondinet barbu entre le concepteur vicieux de meubles en kit suédois et le baba-cool sur le retour. Le charisme d’une huitre et le Q.I. itou. C’est à cause de lui que tout dérape. Ah, le con! Non mais franchement, quand, dans une cave sordide, décorée avec des cadavres de chats pendus, tu trouves un vieux grimoire enveloppé dans quatre épaisseurs de plastique et fermé avec du fil barbelé taille XXL, tu te dis qu’il doit bien y avoir une raison. Et quand tu finis par ouvrir le livre en question et que tu lis, sur chaque page, écrit en grosses lettres rouges sang : “Arrêtez tout de suite votre lecture et ne prononcez surtout pas les incantations que l’on a volontairement noircies”, ben tu refermes sagement le livre et tu fuis en courant. Mais ce glandu n’en a rien à faire. Il brave les interdits et libère le démon.

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Bon OK, s’il ne le fait pas, il n’y a pas de film. Ou alors, on tombe dans le mélo familial larmoyant sur les efforts d’une jeune droguée pour arrêter la came. Mais habituellement, ce genre de personnage agaçant est le premier à trépasser, zigouillé par le tueur psychopathe, le zombi de service ou autre ectoplasme revanchard. Là, on se le tape pendant presque jusqu’au bout – tant pis pour le spoiler – et le mec se paie le luxe de faire la morale à son pote, lui expliquant que tous ses efforts pour rester en vie sont vains, vu qu’ils ont affaire à des démons, et blablabla… Hé connaud, qui c’est qui les a libérés les démons? Hein, c’est qui?
Quelle faute de goût du cinéaste, qui préfère nous infliger ce boulet et sacrifier rapidement la toute mimi Jessica Lucas. Pfff… Il y a des coups de pied occultes qui se perdent!

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Bon, soyons honnêtes, on a déjà vu bien pire que cet Evil dead version 2.0, somme toute relativement correct comparé à la production fantastique actuelle. Mais on a aussi vu bien mieux et on peut légitimement se demander quel est l’intérêt d’un tel remake,  inférieur en tous points au film original. L’appât du gain, sûrement, puisque la simple évocation du titre suffira à attirer les spectateurs nostalgiques du ciné horrifique des années 1980 et leurs enfants, curieux de découvrir une version remise au goût du jour d’un classique du genre. Ah, démon du fric, quand u nous tiens…
On espère simplement que Sam Raimi utilisera les bénéfices de ce remake pour réaliser lui-même un film d’horreur digne de ce nom, dans la lignée de Jusqu’en enfer ou, peut-être, un quatrième volet de sa propre saga Evil dead. Il en est question, en tout cas, tout comme il est d’ores et déjà programmé un Evil dead 2, suite de ce reboot.

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Evil Dead

Réalisateur : Fede Alvarez 
Avec : Jane Levy, Shiloh Fernandez, Jessica Lucas, Lou Taylor Pucci, Elizabeth Blackmore
Origine : Etats-Unis
Genre : remake inutile 
Durée : 1h32
Date de sortie France : 01/05/2012
Note pour ce film : ●●○○○○
Contrepoint critique : Dunnozmovie

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